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saisit par le bras, et entraîna vivement dans l’escalier, malgré sa corpulence. La joyeuse surexcitation de Maslennikov avait pour cause la bienveillance que lui avait témoignée le haut personnage. Toute pareille bienveillance rendait en effet Maslennikov aussi joyeux qu’un petit chien affectueux, caressé ou gratté derrière les oreilles par son maître. Il remue la queue, se tortille, rabat ses oreilles, ou décrit des cercles fous. C’est ce que Maslennikov était prêt à faire. Il ne remarquait pas l’expression sérieuse du visage de Nekhludov, ne l’écoutait pas, et, inévitablement, l’entraînait vers le salon, de sorte que Nekhludov ne pouvant s’y soustraire était obligé de le suivre.

— Les affaires après ; je ferai tout ce que tu voudras, — dit Maslennikov, en traversant le grand salon avec Nekhludov. — Annoncez à la générale le prince Nekhludov, — dit-il tout en marchant, à un valet qui les devança et courut annoncer. — Vous n’avez qu’à ordonner. Mais vois d’abord ma femme. J’ai eu maille à partir avec elle l’autre jour pour ne pas t’avoir conduit chez elle.

Le valet l’avait déjà annoncé, et quand ils entrèrent dans le salon, Anna Ignatievna, la femme du vice-gouverneur, la générale, comme elle s’intitulait, fit à Nekhludov un petit signe d’yeux, des plus aimables, par-dessus le cercle de chapeaux et de têtes qui entouraient son divan.

À l’autre bout du salon, près de la table à thé,