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À la sortie de la prison, de Nekhludov s’approcha un surveillant, tout couvert de croix et de médailles, un homme à la mine sournoise et déplaisante, qui mystérieusement, lui glissa un papier dans la main.

— Voici pour Votre Excellence, c’est une lettre d’une certaine personne… — dit-il en tendant une enveloppe à Nekhludov.

— Quelle personne ?

— Prenez la peine de lire, vous verrez. Une détenue politique. Je suis leur gardien. Alors, voilà, elle m’a prié. C’est défendu, mais par humanité… — ajouta le surveillant d’un ton faux.

Nekhludov, bien que surpris de voir un des gardiens des détenus politiques se charger d’une pareille commission, dans la prison même, presque en vue de tous, ne se doutant pas alors que ce surveillant était un espion, néanmoins prit le papier et le lut une fois dehors. Au crayon, à la hâte, et sans ratures, on avait écrit les lignes suivantes : « Ayant appris que vous venez à la prison et que vous vous intéressez à une détenue de la section criminelle, je désirerais vivement m’entretenir avec vous. Demandez l’autorisation de me voir. On vous l’accordera, et je vous dirai des choses importantes et pour votre protégée et pour notre groupe. Votre reconnaissante : Véra Bogodoukhovskaia. »

Véra Bogodoukhovskaia était institutrice dans