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se mirent à coudre, et Maslova s’assit sur sa couchette, les jambes repliées, tenant ses genoux entre ses mains. Elle s’apprêtait à faire un somme quand la surveillante vint lui dire de se rendre au bureau, où la demandait un visiteur.

— Ne manque pas de lui parler de nous, — dit la vieille Menschova à Maslova pendant que celle-ci arrangeait son fichu devant une glace au tain rongé à moitié. Dis-lui que ce n’est pas nous qui avons mis le feu, mais ce brigand lui-même : un ouvrier l’a vu. Dis-lui qu’il fasse appeler Mitri ; Mitri lui expliquera tout, clair comme sur la paume de la main : qu’on nous a mis en prison, nous qui n’avons rien fait, tandis que le brigand trône dans son cabaret avec la femme d’un autre.

— Ce n’est pas la loi, — confirma Korableva.

— Je le lui dirai, je le lui dirai sans faute, — répondit Maslova. — Allons, buvons pour nous donner du courage, ajouta-t-elle. Korableva lui remplit une demi-tasse. Maslova but, s’essuya la bouche, et, avec un sourire joyeux, en répétant : « pour nous donner du courage », elle rejoignit la surveillante qui l’attendait dans le corridor.