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sensiblement plus petite, et visiteurs et prisonniers moins nombreux, les cris et le bruit y étaient tout aussi violents. Là encore l’autorité marchait entre les deux grillages. Une surveillante, en uniforme, galons aux manches, liserés bleus et ceinture de même couleur, représentait ici l’autorité. Ici comme dans la division des hommes, les visiteurs, en costumes les plus variés, se cramponnaient au grillage ; de l’autre côté se tenaient les prisonnières, la plupart en tenue de prison, les autres dans leurs vêtements. Pas une place libre sur toute l’étendue du grillage. Plusieurs étaient obligées de se hausser sur la pointe des pieds pour crier par-dessus les têtes de celles qui se trouvaient devant elles ; d’autres s’étaient assises par terre.

Son attention fut attirée par la haute et maigre figure d’une prisonnière, une bohémienne, dont les cheveux crépus sortaient d’un fichu, et qui se tenait presque au milieu de la salle, de l’autre côté de la grille, près d’un poteau. Elle expliquait quelque chose d’une voix perçante, en faisant des gestes rapides, à un visiteur en veste bleue serrée par une ceinture, un tzigane. Près du tzigane, un soldat, assis par terre, s’entretenait avec une prisonnière, puis, collé au grillage, un jeune paysan en lapti, à la barbe blonde, le visage tout rouge, qui, sans nul doute, faisait un effort pour retenir ses larmes. Une prisonnière blonde et jolie, aux