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die et sentait plus le fer blanc que le thé, mais Maslova la but cependant en mangeant son pain.

— Finaschka, prends, — fit-elle au petit garçon, qui ne quittait pas des yeux sa bouche, en rompant un morceau de pain, qu’elle lui donna.

Korableva tendit le flacon d’eau de-vie et le gobelet. Maslova lui en offrit, ainsi qu’à la Belle. Elles composaient, à elles trois, l’aristocratie du lieu, étant les seules qui eussent parfois de l’argent, et elles partageaient toujours entre elles ce qu’elles avaient.

Quelques minutes après, Maslova, toute ragaillardie, raconta ce qui l’avait frappée au tribunal et singea le procureur. Elle avait été particulièrement frappée de ce fait, qu’elle avait observé, que les hommes, partout où elle était, couraient après elle. Au tribunal tout le monde l’avait regardée, et tous rentraient à chaque instant dans la salle où elle avait été amenée.

— Un des gardiens me disait bien : C’est toi qu’on vient voir. Quelqu’un entre : Où est tel papier ? Et moi je voyais bien qu’il n’avait besoin d’aucun papier, qu’il me mangeait des yeux. En voilà des artistes ! racontait-elle en souriant, avec un hochement de tête où perçait un reproche.

— C’est bien ça, — approuva la garde-barrière, qui recommença à pérorer de sa voix chantante. — Ils tombent comme les mouches sur le sucre. Pour