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Pierre Guerassimovitch, satisfait de son succès, consentit.

— Mais avec circonstances atténuantes, — intervint le marchand.

Tous y consentirent, sauf le vieil employé qui insista de nouveau pour la déclarer non coupable.

— Mais c’est à cela que nous arrivons, — leur expliqua le chef du jury, — c’est comme si nous disions : non coupable.

— C’est entendu : avec circonstances atténuantes ; ainsi cela effacera ce qui reste, — dit joyeusement le marchand.

On était si fatigué, on s’était tellement embrouillé dans toutes ces discussions que l’idée ne vint à personne de faire ajouter à la réponse : oui, mais sans intention de donner la mort.

Nekhludov était si ému que lui non plus n’y prit pas garde. Les réponses furent donc notées sous cette forme et remises au tribunal.

Rabelais raconte qu’un juriste, appelé à statuer sur un procès, après avoir énuméré une multitude d’articles de lois et lu vingt pages d’un fatras latino-juridique, proposa aux plaideurs de tirer le jugement au sort : pair ou impair. Si le nombre était pair, l’accusateur aurait raison ; s’il était impair, ce serait le demandeur.

Ici, il en fut de même. Telle décision et non une autre était acceptée, non que tous les jurés fussent du même avis, mais : 1o parce que le président du