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éclairait l’office ; Katucha y était seule assise près de la table, les yeux perdus devant elle, l’air pensif. Longtemps il resta à la considérer désirant savoir ce qu’elle faisait, alors qu’elle ne se croyait vue de personne. Elle resta assise, immobile, pendant deux minutes, puis leva les yeux, sourit, fit un signe de tête, comme si elle se fût adressé un reproche à elle-même ; puis, brusquement, appuya ses bras sur la table et se remit à regarder dans le vide.

Il restait à la regarder, écoutant, malgré lui, les battements de son propre cœur, et les bruits étranges venant de la rivière. Là-bas, sur la rivière, dans le brouillard, un travail incessant et lent se poursuivait, quelque chose semblait tantôt ronfler, tantôt craquer, s’effondrer, et de minces glaçons résonnaient comme du verre.

Immobile, il suivait sur le visage de Katucha, fatigué et pensif, les phases d’un travail intérieur pénible, et il avait pitié d’elle ; mais, chose étrange, cette pitié ne faisait qu’augmenter son désir de la posséder.

Ce désir l’avait envahi tout entier.

Il frappa à la fenêtre. Comme mue par un choc électrique, elle frémit de tout son corps, son visage exprima la terreur. Puis elle se leva en sursaut, courut à la fenêtre, et colla son visage à la vitre. Elle garda son expression d’effroi quand, les deux mains posées au-dessus de ses yeux pour mieux