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d’autres demandaient : « Qui est-il ? » Il s’arrêta sur le parvis. Les mendiants l’entourèrent : il leur distribua la menue monnaie qu’il avait dans sa bourse et descendit l’escalier du perron.

L’aube commençait à poindre, mais le soleil ne paraissait pas encore. Les fidèles allaient s’asseoir parmi les tombes qui entouraient l’église. Katucha était restée à l’intérieur, et Nekhludov s’arrêta pour l’attendre.

En faisant résonner les clous des bottes sur les dalles, la foule continuait de sortir et se répandait dans la cour et dans le cimetière de l’église.

Un très vieil homme, à la tête branlante, le pâtissier de Marie Ivanovna, arrêta Nekhludov et l’embrassa trois fois ; puis sa femme, une vieille toute ridée, la tête couverte d’un fichu de soie, lui tendit un œuf teint en jaune safran. Derrière eux, un jeune et vigoureux paysan, vêtu d’un cafetan neuf avec une ceinture verte, s’approcha en souriant :

— Christ est ressuscité ! dit-il, un bon sourire dans les yeux ; et, passant ses bras autour du cou de Nekhludov et lui chatouillant le visage de sa barbe courte, frisée, tandis qu’il l’imprégnait de son odeur particulière, agréable, de moujik, il l’embrassa trois fois à pleine bouche, de ses lèvres fortes et fraîches.

Pendant que Nekhludov s’embrassait avec le paysan et recevait de lui un œuf teint en brique, il