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V


Il faisait une de ces soirées qu’on voit seulement au Caucase. Le soleil se cachait derrière les montagnes, mais il faisait encore clair. La clarté embrassait un tiers du ciel, et, à la lumière rouge, le blanc mat des énormes montagnes ressortait. L’air était vif, immobile et sonore. Une ombre, longue de quelques verstes, tombait des montagnes dans la steppe. Dans la steppe, derrière le fleuve, les routes étaient désertes, des hommes à cheval s’y montraient rarement, et alors les Cosaques du cordon et les Tchetchenzes de l’aoul, regardaient ces hommes avec étonnement et curiosité et tâchaient de deviner quelles pouvaient être ces mauvaises gens. Aussitôt qu’arrive le soir, les hommes, poussés par la peur, se heurtent vers les habitations, et, seuls, la bête et l’oiseau, sans craindre l’homme, errent librement dans ce désert. En causant gaîment, les femmes