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qui tombera. J’ai attrapé ainsi Vanucha, l’oncle Erochka, Loukachka, Marianka. »

Comme Olénine achevait d’écrire cela, l’oncle Erochka entra chez lui.

Erochka était d’humeur fort joyeuse. Un des derniers jours, en entrant chez lui le soir, Olénine le trouvait dans la cour, devant le corps d’un sanglier dont il enlevait dextrement la peau à l’aide d’un couteau court. Son visage était heureux et fier. Ses chiens et entre autres son favori Liam étaient couchés près de lui et agitaient doucement la queue en regardant son travail. Les gamins le contemplaient avec respect à travers l’enclos et même ne l’agaçaient pas comme à l’ordinaire. Les femmes du voisinage, d’habitude pas trop tendres envers lui, le saluaient et lui apportaient, l’une un pot de vin, l’autre du lait caillé, l’autre de la farine. Le matin suivant, Erochka était assis chez lui dans sa hutte, tout ensanglanté, et distribuait le gibier ; aux uns pour de l’argent, aux autres pour du vin. Sur son visage était écrit : « Dieu m’a donné le bonheur de tuer une bête, maintenant l’oncle est devenu utile. » Grâce à cela, sans doute, il se mit à boire et but durant quatre jours sans quitter la stanitza. En outre il buvait aux fiançailles.

L’oncle Erochka vint, ivre-mort, de la cabane des maîtres chez Olénine ; son visage était rouge, sa barbe en désordre, mais il portait un bechmet neuf, rouge orné de galons, et avait une bala-