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Le malheur de notre vie : bien que nous, les gens riches, réparions, soutenions avec l’aide de la science et de l’art notre vie mensongère, cette vie devient d’année en année plus faible, plus maladive et plus inquiète. Le nombre des suicides et le refus de production d’enfants augmentent sans cesse. Chaque année faiblit la nouvelle génération des hommes de notre classe ; chaque année nous sentons croître l’ennui de notre vie.

Évidemment le salut ne peut être dans cette voie d’augmentation du confort et des agréments de la vie, des traitements, des dents artificielles, des faux cheveux, les massages, etc. Cette vérité est devenue un tel truisme que dans les journaux on insère des réclames sur de la poudre pour l’estomac des riches, sous le nom blessings for the poor (bénédiction pour les pauvres). On dit dans cette réclame que seuls les pauvres digèrent bien, que le riche a besoin de remèdes et entre autres de cette poudre.

On ne peut remédier à cela par aucun amusement, par aucune commodité, par aucune poudre ; seul le changement de la vie peut y remédier.

Le désaccord de notre vie avec notre conscience : malgré tout notre soin de justifier devant nous-mêmes notre trahison envers l’humanité, toutes nos justifications tombent en poussière devant l’évidence. Autour de nous des gens meurent d’un travail excessif et de misère. Nous gaspillons la