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L’intendant qui n’était ni amateur ni connaisseur en chevaux, recevant l’ordre de son maître de conduire les meilleurs étalons à la foire aux chevaux, les élimina du troupeau et les mit à part dans l’écurie. Il les nourrit d’avoine et les fit boire. Craignant pour ces chevaux chers, il ne se décidait à les confier à personne, ne les montait pas et même ne les sortait pas. Les chevaux devinrent faibles des pieds et ne furent plus bons à rien.

La même chose nous est arrivée, seulement avec cette différence, qu’on ne peut tromper les chevaux avec rien, et que si pour ne les pas laisser sortir on les tenait attachés, nous, on nous tient dans la même situation artificielle et pernicieuse avec les séductions qui nous entourent et nous tiennent comme des chaînes.

Nous nous sommes organisé une vie contraire à la nature physique et morale de l’homme, et toutes les forces de notre esprit sont tendues pour nous convaincre que c’est la vraie vie. Tout ce que nous appelons la civilisation, les sciences, les arts, le perfectionnement, les plaisirs de la vie, ont pour but de tromper les exigences morales et naturelles de l’homme. Tout ce que nous appelons hygiène, médecine, sont des tentatives de tromper les exigences naturelles et physiques de la nature humaine. Mais ces tromperies ont une limite et nous y arrivons.

Si la vraie vie humaine est telle, alors il vaut