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les exigences de mon oisiveté physique m’abandonnassent d’elles-mêmes, sans le moindre effort. Sans parler déjà de l’habitude de faire du jour la nuit, et inversement, sans parler du coucher, de l’habit, de la propreté conventionnelle qui sont tout à fait impossibles et gênent le travail physique, même la nourriture, le besoin d’avoir une nourriture d’une certaine qualité, se transformait complètement.

Au lieu des aliments sucrés, gras, délicats, compliqués, assaisonnés, auxquels j’étais habitué, la nourriture la plus simple : soupe aux choux, gruau, pain noir, thé peu sucré, m’était nécessaire et agréable.

De sorte que, sans parler déjà de l’exemple simple du pauvre ouvrier qui se contente de peu, et avec qui j’entrais en relation, les besoins eux-mêmes se changeaient peu à peu grâce à la vie ouvrière, de sorte que ma goutte de travail physique, à mesure que je m’habituais et m’adaptais aux procédés de travail, devenait plus marquée. À mesure que le rapport de mon travail augmentait, mes exigences à l’égard du travail des autres devenaient moindres, et la vie, naturellement, sans efforts, sans privations, s’approchait de cette vie simple à laquelle je ne pouvais même rêver sans l’accomplissement de la loi du travail. Il résultait que mes exigences les plus chères de la vie : les exigences de l’ambition et des distractions de l’ennui provenaient de la vie oisive.