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Ce serait bien de parler ainsi si le pouvoir et la population des tisserands se formaient d’eux-mêmes ; mais nous savons bien qu’ils ne sont pas spontanés, que c’est nous qui les faisons. Alors il faut savoir d’où vient ce pouvoir : de Dieu ou de nous-mêmes, et d’où proviennent les tisserands : d’une loi organique ou d’un autre principe ?

Des hommes vivent, se nourrissent du travail de la terre comme il convient à tous les hommes. Un homme a fabriqué une forge et a réparé sa charrue, le voisin vient le trouver et lui demande de réparer aussi la sienne, en échange il lui promet du travail ou de l’argent.

Un troisième, un quatrième viennent, et dans la société de ces hommes naît cette division du travail : il se forme un forgeron.

Un autre a bien appris à ses enfants, le voisin lui amène les siens, lui demande de les instruire ; paraît un précepteur.

Mais le maréchal et le précepteur sont tels, seulement parce qu’on le leur a demandé, et ils resteront tels tant qu’on leur demandera d’être maréchal et précepteur. S’il arrivait qu’il y eût beaucoup de maréchaux et de précepteurs, ou que leur travail devint inutile, alors, comme le demande le bon sens et comme il arrive toujours où il n’y a pas de causes qui font obstacle à la régularité de la division du travail, ils quitteraient aussitôt leur métier et, de nouveau, se mettraient à labourer.