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III

Le soir même, au retour de ma visite à la maison Liapine, j’ai raconté mes impressions à un ami. Mon ami, un citadin, se met à me dire, non sans plaisir, que c’est le phénomène de la vie le plus naturel, que moi seul, à cause de mon provincialisme, j’y vois quelque chose de particulier, mais que ce fut et sera toujours ainsi, que ce doit être, que c’est une condition nécessaire de la civilisation, et qu’à Londres c’est pire… Dans ceci, il n’y a donc rien de mauvais et l’on n’en peut être mécontent. Je me mis à contredire mon ami, mais avec tant d’ardeur, d’emportement que ma femme accourut de l’autre chambre en demandant ce qui était arrivé ; il arrivait que moi-même, sans le remarquer, des larmes dans la voix, je criais et agitais les mains contre mon ami. Je criais : « On ne peut vivre ainsi !… On ne peut vivre ainsi ! Ce ne peut être ! » On me fit honte de mon embal-