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dits instruits, avec leurs activités diverses, depuis le directeur de chemin de fer jusqu’à l’écrivain et l’artiste est maintenant la suivante : Nous qui nous sommes affranchis du devoir humain de participer à la lutte pour l’existence, nous suivons le progrès et par cela même nous sommes utiles à toute la société humaine. Notre utilité rachète tout le tort causé au peuple par la consommation de son travail.

Ce raisonnement semble aux hommes de notre temps tout à fait autre que celui par lequel se justifiaient les hommes d’autrefois qui ne travaillaient pas. De même que le raisonnement des empereurs et des citoyens romains : que sans eux le monde civilisé périrait, semblait tout différent de celui des Égpyptiens et des Perses, de même ce raisonnement semble tout à fait autre que celui des chevaliers du moyen âge et du clergé.

Mais cela semble seulement. Il suffit de pénétrer le sens de la justification d’aujourd’hui pour se convaincre qu’en elle il n’y a rien de nouveau.

Cette explication est seulement vêtue d’un autre habit, mais elle est la même, car elle a la même base.

Toute justification de l’homme qui ne travaille pas et consomme le travail des autres est celle de Pharaon, des pontifes, des empereurs romains et du moyen âge avec leurs citoyens, leurs cheva-