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lière à ces nouveaux modes d’asservissement qu’ils imposent aux hommes, à la place de ceux qui avaient existé jusqu’alors. Ce qui est encore plus surprenant, c’est que la science, la prétendue science libre, puisse, en étudiant les conditions économiques de la vie des peuples, ne pas voir le fait même qu’elles ont pour base. Il semble que ce soit l’affaire de la science de rechercher les liens des phénomènes et la cause générale d’une série d’entre eux. Or, l’économie politique fait tout juste le contraire : elle cache soigneusement ces liens des phénomènes et leur importance, elle évite prudemment les réponses aux questions les plus simples et les plus essentielles ; comme un cheval paresseux qui s’arrête souvent, qui descend bien la côte mais seulement quand le char va tout seul, dès qu’il y a quelque chose à tirer, elle se jette immédiatement de côté, en feignant le besoin d’aller par là. Que la science ait à résoudre un problème sérieux et capital, aussitôt elle entame des raisonnements scientifiques sur des sujets qui n’ont rien à voir à la question et dans le but d’en détourner l’attention.

Vous demandez par exemple d’où vient ce fait irrationnel, monstrueux, et non seulement inutile mais nuisible aux hommes : qu’ils ne puissent manger et travailler que par la volonté d’autrui ? Et la science, de l’air le plus sérieux, vous répond : C’est parce que les uns disposent du travail et de