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anéanti dans nos sociétés civilisées, mais avec le service militaire obligatoire, il a augmenté dans les derniers temps, et maintenant comme toujours, il reste, mais sous une forme un peu modifiée. Et il ne peut pas ne point exister parce que tant que subsistera l’asservissement d’un homme par un autre, cet esclavage personnel, qui par la menace de l’épée soutient l’asservissement foncier et l’impôt, existera.

Peut-être cet esclavage — c’est-à-dire l’armée — est-il très nécessaire, comme on dit, pour la défense et la gloire de la patrie, mais cette utilité est plus que douteuse, car nous voyons souvent, dans les guerres malheureuses, qu’il sert à l’asservissement et à la honte de la patrie. Mais l’utilité de cet esclavage pour le soutien de l’asservissement foncier et de l’impôt est absolument indiscutable. Que les Irlandais ou les paysans russes prennent les terres des propriétaires, des troupes viendront et les reprendront. Qu’on bâtisse une distillerie ou une brasserie, et qu’on ne paie pas les droits, aussitôt des soldats viendront et fermeront l’usine : qu’on refuse de payer les impôts, ce sera la même chose.

La deuxième vis, c’est le moyen d’asservir les hommes en prenant leurs terres et réserves de nourriture.

Ce moyen d’asservissement existe toujours où les hommes sont asservis, et quelque forme qu’il ait, il existe partout. Tantôt toute la terre appar-