Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol26.djvu/185

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

produits de ses paysans, évidemment que le rapport même des prix des divers objets entre les paysans variera toujours suivant l’achat par le propriétaire de tel ou tel objet. Supposons qu’un propriétaire ait fixé un impôt très grand et son voisin un impôt très bas ; il est évident que dans le domaine du premier les objets seront beaucoup meilleur marché que chez le second et que le prix, chez l’un ou chez l’autre, ne dépendra que de la hausse ou de la baisse de la redevance.

Telle est l’influence de la violence sur les prix.

L’autre influence qui découle de la première se fait sentir dans la valeur relative de tous les objets. Supposons qu’un propriétaire aime les chevaux et les paie cher, qu’un autre aime les serviettes et les paie cher ; il est évident que dans les domaines des deux propriétaires les chevaux et les serviettes seront à un prix élevé et que le prix de ces objets ne correspondra pas à celui des vaches ou du blé. Si demain meurt l’amateur de serviettes et que son héritier aime les poules, alors le prix des serviettes tombera, celui des poules augmentera. Dans une société où existe la violence d’un homme envers un autre, la signification de l’argent comme mesure de valeur dépend aussitôt du bon gré des spoliateurs et sa signification comme moyen d’échange des produits du travail se remplace par la signification du moyen le plus commode de jouir du travail d’un autre. L’argent est nécessaire aux spoliateurs,