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les propositions de l’Église. Je le faisais malgré moi, en luttant, avec le désir d’atténuer autant que possible mon désaccord avec l’Église, de ne pas m’en séparer, de ne pas me priver du plus grand bonheur que procure la religion — la communion avec nos semblables. Mais, quand j’eus terminé mon travail, je vis que malgré mes efforts pour maintenir au moins quelque chose de la doctrine de l’Église, il n’en était rien resté. C’est peu de dire qu’il n’en restait rien ; je devais me convaincre qu’il n’en pouvait rien rester.

Mon travail touchait déjà à sa fin quand se produisit la chose suivante : un enfant, mon fils, vint me raconter qu’il y avait une discussion entre deux de nos domestiques, gens sans aucune instruction, à propos d’un passage d’un livre religieux où il était dit que ce n’est pas un péché de tuer les criminels et de tuer des ennemis à la guerre. Ne pouvant croire qu’une telle chose fût imprimée, je demandai à voir le livre. Le livre qui avait provoqué cette discussion avait pour titre : Livre de prières raisonné, troisième édition (huitième dizaine de mille). Moscou, 1879. Dans ce livre, page 163, on lit :

« Quel est le sixième commandement de Dieu ? — Tu ne tueras pas. Ne tue pas — tu ne tueras pas. — Qu’est-ce que Dieu défend par ce commandement ? — Il défend de tuer, c’est-à-dire d’ôter la vie d’un homme. — Est-ce un péché de punir de