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conformément à la volonté de celui qui nous l’a donnée, ou à la rendre éternelle dans les générations, comme l’enseignent les Juifs, ou à l’identifier à la volonté du Père, comme l’enseigne Christ, elle consiste à croire qu’après cette vie commencera la vraie vie.

Christ ne parle pas de cette vie chimérique, que Dieu devait nous donner mais qu’il ne nous donne pas, on n’a jamais su pourquoi. La théorie de la chute d’Adam, de la vie éternelle dans le paradis, et de l’âme immortelle communiquée à Adam, était inconnue à Christ ; il n’en a pas parlé et n’a jamais fait la moindre allusion à son existence.

Christ parle de la vie telle qu’elle est, telle qu’elle sera toujours. Nous parlons d’une vie que nous nous sommes figurée et qui n’a jamais existé ; comment donc pourrions-nous comprendre la doctrine du Christ ?

Christ ne pouvait supposer chez ses disciples une interprétation aussi étrange. Il suppose que tous les hommes comprennent nécessairement l’anéantissement de la vie personnelle et il leur révèle une vie impérissable. Il offre le vrai bien à ceux qui souffrent, mais à ceux qui croient posséder plus que ne donne Christ, sa doctrine ne peut rien donner. J’exhorte un homme à travailler en lui garantissant pour cela la nourriture et les vêtements ; mais cet homme se figure soudain qu’il est déjà millionnaire ; évidemment il ne tiendra aucun