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avoir recours aux interprétations de Paul, de Clément, de Chrysostome et des autres, voilà ce que je ne comprenais pas autrefois, ce que je sais maintenant, et ce que je veux dire à tous.

Le larron sur la croix crut en Christ et fut sauvé. Si le larron n’était pas mort sur la croix, s’il avait pu raconter aux hommes comment il crut en Christ, se pourrait-il que cela fût mal et nuisît à quelqu’un ?

Comme le larron en croix, je crus à la doctrine du Christ et fus sauvé. Ce ne sont pas là de vaines paroles, c’est l’expression fidèle de l’état de mon âme, jadis remplie de désespoir et d’épouvante devant la vie et la mort, maintenant paisible et joyeuse.

Comme le larron, je savais que ma vie, passée et présente, était mauvaise, et je voyais que la plupart des hommes qui m’entouraient vivaient comme moi. Je savais, comme le larron, que j’étais malheureux et que je souffrais, que les hommes, autour de moi, étaient malheureux et souffraient, et, pour sortir de cette situation, je ne voyais d’autre issue que la mort. Comme le larron cloué à sa croix, j’étais attaché par une force quelconque à cette vie de souffrance. Et, comme lui, je voyais venir les horribles ténèbres de la mort après les souffrances et les maux d’une vie insensée.

Ainsi je ressemblais au larron, mais il y avait pourtant une différence entre nous : il allait mourir,