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pour circonscrire le mal et punir les méchants, mais ils exhortent chacun à des efforts individuels et personnels pour soutenir la justice, pour arrêter les agresseurs et empêcher les méchants de faire le mal aux autres ; en effet, autrement ces commandements spirituels du Sauveur deviendraient comme chez les Juifs lettre morte et pourraient engendrer la propagation du mal et la destruction de la vertu. L’amour du chrétien doit être semblable à l’amour de Dieu, mais l’amour divin circonscrit et punit le mal autant seulement qu’il est nécessaire pour la gloire de Dieu et le salut du prochain ; dans le cas contraire, il faut mettre des bornes au mal et le punir, et c’est là le rôle des autorités. » (Commentaires des Évangiles par l’archevêque Mikhaïl, ouvrage basé sur les écrits des Pères de l’Église.) Les chrétiens savants et libres penseurs ne s’embarrassent pas davantage du sens de ces paroles de Christ et ne se gênent pas pour le corriger. Ils disent que ce sont des sentences sublimes mais inapplicables à la vie, car si l’on pratiquait à la lettre le commandement de la non-résistance au méchant, l’ordre de choses que nous avons si bien organisé serait détruit. Ainsi disent Renan, Strauss et tous les commentateurs libres penseurs.

Mais il suffit de traiter les paroles de Christ comme nous traitons celles du premier venu qui nous parle, c’est-à-dire admettre qu’il dit exactement ce qu’il dit, pour que disparaisse aussitôt la