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3) Ζωή signifie tantôt la vie spirituelle, tantôt la vie charnelle ; mais Ζωή, chez Jean, signifie toujours le monde temporaire de la chair, opposé à la vie de l’esprit. C’est pourquoi ζωή doit être traduit : la vie de ce monde.

La phrase est obscure, et il n’en peut être autrement puisque dans cette phrase, par la comparaison de la doctrine avec le pain, Jésus exprime une nouvelle pensée, à savoir que sa doctrine consiste à vivre par l’esprit et à négliger la vie de la chair, pensée plusieurs fois exprimée sous d’autres formes : celui qui ne renonce pas à soi-même, celui qui ne prend pas la croix, etc. Il est dans l’intention de l’auteur de l’Évangile que la phrase soit obscure. Les Juifs n’y comprennent rien, et Jésus, ensuite, en explique le sens.

Mais c’est sur cette phrase obscure que l’on fonde les dogmes ; et, sans parler de la stupidité et de l’immoralité des dogmes, il faut du moins remarquer que cette phrase, sur laquelle s’érigent les dogmes, est traduite à contre sens. Ὑπερ ne peut pas signifier pour ; τοῦ ϰόσμου ζωῆς, ne peut pas signifier la vie des hommes. Si l’on ne tient pas compte des erreurs de traduction, cette phrase, telle qu’elle est donnée, n’est qu’un assemblage de mots dépourvus de sens.

Voici ce que l’Église dit de ce passage[1].

  1. Interprétation de l’Évangile de Jean, par l’archevêque Mikhaïl, p. 135.