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qu’elle présentait, de toutes les autres qui servaient alors à des bains hygiéniques ? Évidemment non ! Il a dû donner des explications préalables, et le verset 7 reste inintelligible si l’on efface le verset 4 et la moitié du verset 3. Nous admettons donc que ce retranchement s’est fait après coup, comme celui, non moins remarquable, des versets 43 et 44, du xxiie chapitre de Luc. Le phénomène en lui-même, tel que le passage suspect le décrit, n’a rien d’étrange ; l’action de l’eau jaillissante peut parfaitement avoir été plus forte dans l’espace restreint de l’embouchure. On nous a reproché de vouloir maintenir la leçon vulgaire uniquement pour le plaisir d’attribuer à l’apôtre une superstition. Mais si les apôtres, d’après ce point de vue, font preuve de superstition en croyant à l’intervention des anges dans le monde physique, il faut biffer bien d’autres passages encore pour leur épargner ce reproche.

Quoi qu’il en soit, le fait est raconté dans un tout autre but. Il s’agit de Christ dans le monde, action sans doute essentiellement spirituelle, mais symbolisée par des guérisons du corps ; et action permanente, non soumise à des conditions de temps et de circonstances extérieures, telles que seraient l’assistance de quelque autre force naturelle ou surnaturelle, en dehors de lui, ou bien encore une règle légale qui eût pu le gêner. C’est par cette dernière considération que le récit continue, ou plutôt qu’il passe de la narration d’un fait à l’exposition des vérités absolues, de l’histoire à la théologie.

Jésus a voulu guérir un homme malade de paralysie depuis un temps immémorial ; voici la légalité traditionnelle qui se met en travers. Il n’est pas difficile de saisir le sens profond du récit qui nous est offert.

Le terme dont l’auteur se sert pour motiver l’intervention de Jésus, a été traduit par le mot sachant et non ayant appris. De fait, la première de ces expériences n’implique pas nécessairement l’idée du miracle, mais elle ne l’exclut pas non plus, et nous croyons devoir la