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le bassin (ébullition locale intermittente de la source), il paraît qu’anciennement déjà l’explication que l’auteur en donne a soulevé des doutes. Il y a des manuscrits et autres témoins anciens qui omettent soit les derniers mots du verset 3 (qui attendaient, etc.), soit tout le verset 4, soit toutes ces parties du texte. Des critiques modernes, en grand nombre, ont jugé que ces témoignages étaient assez décisifs pour condamner les autres lignes en question, comme étrangères à la rédaction primitive. On suppose alors qu’il y a là une légende judaïque ou chrétienne qui aurait fini par trouver place dans le récit pour expliquer ce que dit le malade au verset 7, et qui, à tout prendre, serait indigne de l’apôtre.

À première vue, cette manière de voir est assez plausible. Comme les juifs et les chrétiens ne marchandaient nulle part l’intervention des anges dans les affaires de ce monde, on ne voit pas pourquoi elle aurait été effacée ici, si l’auteur en avait réellement parlé dans sa narration. Cependant il y a aussi des arguments à faire valoir dans le sens opposé. La question n’est pas de savoir s’il y a moyen de donner une explication naturelle du phénomène, ou si Jean a pu partager une opinion populaire ; il faut voir si l’ensemble de son texte demande que les phrases suspectes y soient comprises, ou si l’on peut les omettre sans déranger le reste. Or, on voit plus loin que l’auteur parle de l’agitation de l’eau comme d’une chose connue de ses lecteurs ; il met dans la bouche du malade des paroles qui supposent que le lecteur sait déjà de quelle condition tout exceptionnelle dépendait la guérison.

Nous demanderons donc si l’auteur, qui ailleurs explique à ses lecteurs des détails que tous les Juifs, et surtout ceux de Jérusalem, pouvaient savoir, et cela par la simple raison qu’il n’écrivait pas pour les Juifs, si l’auteur, disons-nous, a pu supposer que des étrangers connaîtraient la nature particulière de la source de Bethesda, si différente pourtant, par les phénomènes