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Ainsi faites, vous, ce qu’il faut, et n’oubliez pas que nous, les mauvais ouvriers, n’avons pas fait ce qu’il fallait, et n’attendez point de récompense. Le souci ne doit pas avoir pour objet d’obtenir une récompense, mais ce qu’il faut pour la recevoir : ne pas être un mauvais serviteur. Il faut se soucier non de ce qu’il y aura une récompense, mais de ce qu’il y aura la vie. Cela ne peut être autrement, mais il faut prendre soin de ne pas perdre cette vie, de ne pas oublier qu’elle nous est donnée pour porter ses fruits et accomplir la volonté de Dieu, et il ne nous faut pas penser que nous l’avons remplie et que nous méritons une récompense.

C’est seulement alors que vous comprendrez qu’il existe le royaume de Dieu duquel je vous parle, et que ce royaume de Dieu est l’unique salut de la mort, et qu’il ne paraîtra pas de manière qu’on le puisse voir. Du royaume de Dieu qui sauve de la mort on ne peut pas dire : le voilà, il est arrivé, ou : le voici, il va venir ; il est par ici, il est par là. Il est en vous, dans votre âme. Si donc, quand le moment viendra, vous voulez trouver le salut dans la vie et vous mettez à le chercher, vous ne le trouverez nulle part et jamais. Si l’on vous dit : le salut est ici, là-bas, ne le cherchez point hormis en vous-mêmes. Car le salut est comme l’éclair qui brille instantanément et partout, et il n’y a pour lui ni temps ni espace ; il est en vous.