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la naissance de l’enfant, sans égard du sabbat. Or, qu’est-ce que la circoncision en comparaison de la guérison d’un homme malade de tous ses membres ? Qu’est-ce qu’une consécration rituelle en comparaison d’un acte de bienfaisance ? Qu’est-ce que la chair en comparaison de l’esprit ? Le raisonnement est moins populaire que celui conservé par les Synoptiques (Matth., xii, 2 ; Luc, xiv, 5), mais il répond mieux à la circonstance, en tant qu’il s’agissait pour Jésus de s’autoriser de la loi même pour justifier son acte.

Il y a cependant un peu d’obscurité dans l’exposé de l’argument, et les éditions même s’en sont ressenties. Le texte vulgaire que nous suivons ici commence le verset 22 par les mots : C’est pour cela que, tandis que les modernes rattachent ces mots au verset précédent : vous étonnez à cause de cela. Cette dernière combinaison paraît plus simple, mais elle est contraire à l’usage de l’auteur, qui met régulièrement ces mots en tête de ses phrases et jamais à la fin.

Ici ils doivent insinuer que c’est à dessein que Moïse a conservé l’antique institution de la circoncision, comme telle, et sans y déroger au profit du sabbat, afin de faire ressortir la supériorité de la première ; Jésus, voulant mettre la guérison qu’il avait opérée sur la même ligne que la circoncision, comme quelque chose de supérieur au sabbat, indique ce but par l’adverbe en question placé en tête de son raisonnement. Avec l’autre ponctuation, le verset 22 est isolé du reste et le fil de l’argumentation est perdu.

Sans parler de l’impossibilité philologique d’une pareille traduction, que résulterait-il de cette traduction et de ces interprétations ? Jésus a commencé par dire que ce qu’il enseigne n’est pas de lui mais de Dieu, et que celui qui remplit la volonté de Dieu saura si ce qu’il dit est vrai ou non. À