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n’ont pas de sens avant la crucifixion de Jésus, doivent être omises.


Rien ne définit plus clairement la véritable signification de l’enseignement de Jésus que ce discours, répété dans les trois Évangiles, qu’il adresse à ses disciples avant de les envoyer répandre sa doctrine. Si ces paroles de Jésus n’avaient pas d’autre signification que celle que leur reconnaissent les Églises, elles seraient incompréhensibles. Pourquoi, en effet, faut-il frapper les disciples et les tuer, si leur prédication n’est qu’une exhortation à la réconciliation de chacun avec son frère, à la pureté corporelle, à la non-condamnation du prochain, au pardon des offenses, si elle est l’avertissement que Dieu a envoyé son fils sur la terre ? On ne peut se représenter des gens assez stupides et oisifs pour se donner la peine de poursuivre et de battre des individus coupables seulement de pareils propos. On ne peut imaginer les raisons que pourraient inventer les persécuteurs pour frapper, torturer, tuer, d’inoffensifs prédicateurs, propageant de bons principes moraux et la fable du fils de Dieu. À qui pouvaient-ils nuire ? Qui voulait les écoutait ; les autres ne les écoutaient pas ; à quoi bon frapper et persécuter ? Si même il se fût agi d’une doctrine morale bonne mais peu claire, paradoxale, comme la représentent les historiens libres-penseurs, il