Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol21.djvu/106

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme les deux suivantes, en invoquant la parole de Dieu. Il cite le passage du Deutéronome, viii, 3, dans lequel Moïse dit que Dieu, lorsqu’il matait le peuple d’Israël, le fit souffrir de la faim et le nourrit de manne, que ni ses pères ni lui ne connaissaient. Dieu fit cela pour montrer que l’homme peut vivre non seulement de pain, c’est-à-dire soutenir son existence, mais qu’il y a d’autres aliments capables de suffire à la vie humaine, par exemple la manne, et tout ce qu’indiquera la parole de Dieu. Le Sauveur, rappelant ce passage, indique par là au tentateur qu’il ne faut pas transformer miraculeusement les pierres en pain, qu’outre le pain il est d’autres moyens d’apaiser la faim, suivant la parole ou l’acte de Dieu. C’est le sens le plus direct, le plus naturel de ce passage. Toutefois il fait allusion à la nourriture spirituelle dont se nourrit le croyant et qui, pour un moment, lui fait oublier la nourriture corporelle, comme s’il n’en avait pas besoin. Cette nourriture spirituelle c’est la parole de Dieu, la doctrine divine, les commandements et les ordres divins, dont l’exécution fait la nourriture spirituelle plus nécessaire pour l’âme que la nourriture corporelle. Toute parole de Dieu adressée à celui qui l’entend soutient sa vie. Dieu peut nourrir un affamé rien que par la parole. Aussi le sens de la réponse du Christ est-il celui-ci : Mon besoin de pain n’est pas présentement si grand qu’il me force à faire un miracle. La vie dépend de la volonté de Dieu, Dieu peut la soutenir non seulement avec le pain, mais avec tout ce qu’il a indiqué comme nourriture. Or la parole de Dieu, ses commandements et ses ordres, que l’homme doit connaître, c’est une nourriture spirituelle qui sait faire oublier la faim corporelle. L’homme qui se nourrit de cette parole paraît ne pas éprouver le besoin de nourriture matérielle.

Le mena et le mit. Cela ne signifie pas que le diable ait transporté Jésus dans l’espace ou l’ait forcé à se déplacer de cette manière, ou qu’il ait obtenu cela par