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substitue sa propre doctrine à celle du Christ. La substitution est faite de telle façon qu’on ne peut la discerner d’un coup ; il semble seulement qu’à la doctrine claire et évidente du Christ, se soient ajoutées quelques vérités expliquées par l’Église, qui, non seulement ne détournent pas la doctrine du Christ, mais la rehaussent. La contradiction qui est ici introduite subrepticement dans la doctrine, et sera l’objet d’une explication dans la section de la grâce, consiste en ceci : Christ-Dieu, en descendant sur la terre, a sauvé les hommes déchus. En même temps, il leur a donné la loi qui peut les sauver. Or, si les hommes ont péri, si « Dieu a eu pitié » d’eux et a envoyé son Fils (qui est Dieu) sur la terre pour souffrir et mourir afin de tirer les hommes de la situation où ils se trouvaient avant cette rédemption, cette situation a dû changer. Mais non ; on affirme aussi que Dieu donne encore aux hommes, la loi, (la loi de la foi et des actes), et que s’ils violent cette loi, ils périssent comme avant la rédemption. De sorte que si l’observance de la loi est la condition du salut, le salut des hommes par la mort du Christ est superflu ou tout à fait inutile. Si le salut par la mort du Christ est efficace, l’observance de la loi est inutile, et la loi elle-même est superflue. Il faut choisir, et la doctrine de l’Église choisit le dernier. Elle reconnaît la réalité de la rédemption, mais elle ne va pas jusqu’à reconnaître que la loi est superflue. Elle n’ose