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chant que mon salut ou ma perte dépend de sa compréhension, de sa connaissance la plus essentielle, s’exprimerait de telle façon que ma raison, donnée par lui, ne puisse le comprendre ; qu’il cacherait (d’après la doctrine de l’Église) toute cette vérité, la plus nécessaire aux hommes, sous des allusions, et en tout cas sous l’interprétation double et obscure des mots : Saint-Esprit et Fils, dans l’entretien d’adieu de Jésus à Jean, et dans le verset discuté des Épitres, et que ma connaissance de Dieu et mon salut, et le salut de milliards d’hommes, dépendraient de l’habileté dialectique plus ou moins grande de Renan et de Macaire et de la qualité des arguments. Je ne puis croire cela. Non. S’il en était ainsi, Dieu m’aurait donné une raison qui me permît de comprendre que 3 = 1, tandis que maintenant cela m’est impossible ; il m’aurait donné un cœur selon lequel l’existence de trois Dieux me serait agréable, tandis que, précisément, elle me révolte. Ou, au moins, il me l’aurait transmis, en termes nets et simples et non en des paroles discutables et ambiguës. En outre, Dieu ne pouvait pas m’ordonner de croire. Je ne crois pas justement parce que j’aime, respecte et crains Dieu. Je crains de croire au mensonge qui m’entoure et de perdre Dieu. C’est impossible. Il est même clair que la vérité n’est pas du tout là, que je me suis trompé en pensant trouver dans l’Église la réponse et la solution de mes doutes. Je pensais