Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol2.djvu/64

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mier lycée. C’était un brun, grand et maigre, très pâle, avec la joue entourée d’un bandeau noir et le front plein de boutons ; ses mains étaient maigres, rouges, avec des doigts extraordinairement longs et des ongles tellement rongés que les bouts des doigts semblaient ficelés. Tout cela me semblait très bien et tel que ce devait être chez le premier lycéen. Il parlait avec tous de la même façon, moi-même je fis sa connaissance, mais cependant il me semblait que dans sa démarche, dans le mouvement de ses lèvres et dans ses yeux noirs, il y avait quelque chose d’extraordinaire, de magnétique.

Pour l’épreuve de mathématiques je vins plus tôt qu’à l’ordinaire. J’étais très bien préparé, mais deux questions d’algèbre, que j’avais cachées à mon maître, m’étaient tout à fait inconnues. Il s’agissait, je m’en souviens comme si c’était aujourd’hui, de la théorie des combinaisons et du binôme de Newton. Je m’assis sur un des derniers bancs et parcourus ces questions ignorées, mais inaccoutumé à travailler dans une salle bruyante et le défaut de temps me pressant, je ne pus comprendre ce que je lisais.

— Le voilà, viens ici, Nekhludov, — prononça la voix connue de Volodia.

Je me tournai et j’aperçus mon frère et Dmitri, qui, la redingote déboutonnée, en agitant les mains arrivaient près de moi à travers les bancs. On voyait tout de suite qu’ils étaient étudiants de