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des tables, et d’autres assis dans de larges fauteuils ; à ce moment même, je perdis l’espoir d’attirer sur moi l’attention générale, et mon visage qui, à la maison et même dans le vestibule, exprimait comme le regret de ne pas avoir un aspect noble et imposant, prit l’expression d’une très grande timidité et d’un certain ennui. Bientôt, même, je tombai dans l’autre extrémité et pris plaisir à remarquer sur le banc le plus proche un monsieur très mal habillé et malpropre, pas encore vieux, mais presque tout à fait gris, qui, loin des autres, était assis sur le dernier banc. Je m’assis aussitôt près de lui et me mis à observer les candidats et à faire mes réflexions sur eux. Ici, il y avait beaucoup de personnes et de types différents, mais tous, selon ma conception d’alors, se partageaient facilement en trois catégories : les uns étaient venus comme moi avec leurs gouverneurs ou leurs parents, pour subir l’examen ; de ce nombre, le cadet des Ivine avec une de mes connaissances, Frost, et Ilinka Grapp avec son vieux père. Tous ces jeunes gens avaient du duvet au menton ; on apercevait leur linge, et ils étaient assis tranquillement, sans ouvrir les livres et les cahiers qu’ils avaient apportés avec eux ; ils regardaient les professeurs et les tables d’examen avec une timidité évidente. Les aspirants de la deuxième catégorie étaient des jeunes gens en uniforme de lycéens, beaucoup parmi eux avaient déjà la barbe