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XIX


« Où sont ces rêves ? » pensait maintenant le jeune homme, après ses visites, en approchant de la maison. « Voilà déjà plus d’une année que je cherche le bonheur dans cette vie, et qu’ai-je trouvé ? Parfois, il est vrai, je sens que je puis être content de moi, mais c’est un contentement froid, raisonnable. Mais non, je suis tout simplement mécontent de moi ! Je suis mécontent parce qu’ici je n’ai pas le bonheur et que je le désire, je le désire passionnément. Je n’ai pas encore éprouvé de plaisir et j’ai déjà rejeté de moi tout ce qui le donne. Pour quel but, pourquoi ? Quelle amélioration en est-il résulté ? Ce que m’écrivait ma tante était vrai : il est plus facile de trouver le bonheur pour soi-même que de le donner aux autres. Mes paysans sont-ils devenus plus riches ? Sont-ils plus instruits ou plus développés moralement ? Pas du tout, leur sort ne s’est point amélioré, et pour moi