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à l’Université, de partir pour Pétrovskoié avec les fillettes aussitôt après Pâques ; moi et Volodia nous irions les rejoindre.

Volodia, pendant tout l’hiver, et même au printemps, était l’inséparable du Doubkov (avec Dmitri il commençait à être un peu en froid). Leurs principaux plaisirs, comme j’en pouvais juger par les conversations que j’entendais, consistaient à boire sans cesse du champagne, à aller en traîneau sous les fenêtres d’une demoiselle dont, à ce qu’il me semblait, ils étaient amoureux tous deux, et à danser en vis-à-vis, non plus à des bals d’enfants, mais à de vrais bals. Cette dernière circonstance, malgré l’affection que Volodia et moi avions l’un pour l’autre, nous désunit beaucoup. Nous sentions trop la différence entre un garçon pour qui l’on fait venir encore des professeurs, et l’homme qui danse à de grands bals, pour nous confier l’un à l’autre nos pensées.

Katenka était déjà tout à fait grande, elle lisait une foule de romans et l’idée qu’elle pouvait bientôt se marier ne me semblait déjà plus une plaisanterie ; mais, bien que Volodia fût grand lui aussi, ils ne s’entendaient pas, et même, à ce qu’il me semble, ils se dédaignaient réciproquement. En général, quand Katenka était seule à la maison, rien ne l’intéressait sauf les romans et le plus souvent, elle s’ennuyait, et quand venaient des étrangers, elle devenait très vive, très aimable et faisait