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un petit paysan parlait, la main étendue vers la mer, et les autres l’écoutaient.

L’archevêque s’arrêta et regarda dans la direction qu’indiquait le paysan. On ne voyait rien, rien que la mer étincelant au soleil. L’archevêque s’approcha du groupe et prêta l’oreille. À sa vue le paysan se découvrit et se tut. Les autres, l’imitant, retirèrent leurs bonnets, par déférence pour l’archevêque.

— Ne vous dérangez pas, mes frères, dit l’archevêque… Je suis venu pour écouter aussi ce que tu racontes, mon brave.

— Ma foi, le petit pêcheur nous racontait l’histoire des trois vieillards, fit un marchand, moins timide que les autres.

— Ah !… Et qu’est-ce qu’il en raconte ? demanda l’archevêque.

Il alla vers le bastingage et s’assit sur un coffre.

— Continue, ajouta-t-il, je veux aussi t’écouter. Que montrais-tu donc ainsi mon ami ?

— Mais l’îlot qu’on aperçoit là-bas, répondit le petit paysan, en indiquant un point de l’horizon, à sa droite. C’est précisément sur cet îlot que les vieillards font leur salut.

— Mais où est-il cet îlot ? fit l’archevêque.

— Veuillez regarder dans la direction de ma main… Voyez-vous ce petit nuage ? Eh bien ! C’est un peu plus bas… à gauche… on dirait une bande grise.