Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol19.djvu/423

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tous les plaisirs, mais seulement ne franchis pas cette porte ; et si tu la franchis, rappelle-toi alors ce que tu as vu dans la forêt.

Alors le parrain prit congé de son filleul. Le filleul resta seul dans le palais et y vécut. Il s’y trouvait si bien, si heureux, qu’il pensait n’y avoir vécu que trois heures, et il y était depuis trente ans. Au bout de ces trente ans, le filleul s’approcha une fois de la porte scellée et pensa :

« Pourquoi mon parrain m’a-t-il défendu d’entrer dans cette chambre ? Je vais aller voir ce qu’il y a là. »

Il poussa la porte ; les scellés se brisèrent ; et la porte s’ouvrit. Le filleul y pénétra, et vit un salon plus grand, plus merveilleux que tous les autres. Au milieu il y avait un trône en or. Le filleul marcha à travers le salon, s’approcha du trône, en gravit les degrés et s’y assit. Une fois assis, il vit près du trône un sceptre qu’il prit entre ses mains.

Aussitôt qu’il eut saisi le sceptre les murs du salon s’évanouirent.

Le filleul, regardant autour de lui, vit le monde entier et tout ce que les hommes font dans le monde. Il regarde tout droit, il voit la mer : des bateaux voguent. Il regarde à droite, et voit des peuples étrangers, hérétiques. Il regarde à gauche, ce sont des chrétiens, mais non des Russes. Il regarde derrière lui : ce sont les Russes.

« Maintenant je vais voir comment vont les