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coups, lorsque l’eau, s’échappant dans la rue par la rigole, arriva juste à l’endroit où la grand’mère essayait d’apaiser les paysans. Les enfants couraient des deux côtés du ruisselet :

— L’eau va plus vite que nous ; rattrape-la, Malacha, rattrape-la ! criait Akoulina.

Malacha voulait aussi dire quelque chose ; mais la joie lui coupait la parole. Les fillettes couraient toujours et riaient de voir le bâton nager sur le ruisselet. Elles arrivèrent ainsi jusqu’au milieu des paysans. La vieille les aperçut et cria aux gens :

— Vous ne craignez donc pas Dieu, vous, paysans ! C’est à cause de ces enfants que vous avez commencé de vous battre ; et voyez, elles l’ont oublié depuis longtemps, elles, les voilà qui jouent ensemble de bon cœur. Elles sont plus raisonnables que vous.

Les paysans regardèrent les deux fillettes et eurent honte de ce qu’ils faisaient. Ils se moquèrent d’eux-mêmes et chacun rentra chez soi.

« Si vous n’êtes pas comme des enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux. »