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levés, sa tête chauve et luisante, tel qu’il lui était apparu à Jérusalem, près du Saint-Sépulcre. Au-dessus de sa tête, à travers le petit bouleau, le soleil jouait, comme à Jérusalem la lumière des lampes ; et autour de sa tête les abeilles dorées, volant sans le piquer, lui faisaient une auréole.

Efim s’arrêta. La vieille appela son mari.

— L’ami est là ! dit-elle.

Elisée se retourna, poussa un cri de joie et alla au-devant de son compagnon, en retirant avec précaution les abeilles de sa barbe.

— Bonjour, vieux ! bonjour, mon ami ! As-tu fait bon voyage ?

— Oh ! j’ai bien usé mes jambes. Je t’ai apporté de l’eau du Jourdain. Viens chez moi la chercher. Mais je ne sais pas si Dieu a béni mes efforts…

— Eh bien ! que Dieu soit loué ! que le Christ te sauve !

Après un moment de silence Efim reprit :

— J’y ai été de mes jambes, mais y ai-je été de mon âme ? N’est-ce point plutôt un autre…

— C’est l’affaire de Dieu, mon ami ! C’est l’affaire de Dieu !

— En revenant, je me suis arrêté dans l’izba où tu étais entré.

Elisée, effrayé, lui coupa la parole :

— C’est l’affaire de Dieu, mon cher ! C’est l’affaire de Dieu !… Viens chez nous, j’apporterai un peu de miel.