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Ivan avait oublié son père ; il ne comprenait pas ce qu’on lui disait.

— Quel père ? Qui demande-t-on ? fit-il.

— Il te demande. Il se meurt dans notre izba ; viens, oncle Ivan, dit le fils de l’ancien, le tirant par la main.

Ivan le suivit.

Pendant qu’on retirait le vieillard, des pailles enflammées étaient tombées sur lui ; et il avait reçu de graves brûlures. On l’avait emporté chez l’ancien du village qui habitait un endroit assez éloigné, que le fléau avait épargné.

Lorsqu’Ivan arriva pour voir son père, il ne se trouvait dans l’izba que la vieille femme du staroste, avec les enfants assis sur le poêle. Tous les autres avaient couru au feu. Le vieillard était étendu sur un banc, un cierge à la main, les yeux tournés vers la porte. Quand son fils entra, il fit un mouvement. La vieille s’approcha et l’avertit que son fils était là. Il lui demanda de venir plus près. Ivan s’approcha et le vieillard lui dit :

— Eh bien ! Ivan, que te disais-je ? Qui donc a incendié le village ?

— C’est lui, père ! répondit Ivan. C’est lui, je l’ai pris sur le fait. C’est sous mes yeux qu’il a mis le feu au toit… Je n’avais qu’à retirer la paille enflammée et à la piétiner ; rien ne serait arrivé.

— Ivan, dit le vieillard, je vais mourir, et tu mourras aussi. Qui a péché ?