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grave. Bonjour, Constantin Dmitriévitch. C’est particulièrement imagé, et quelle richesse à ce passage où l’on sent l’approche de Cordelia, où la fille des ewig Weibliche entre en lutte avec le destin ! N’est-ce pas ?

— En quoi ici Cordelia ? demanda timidement Lévine, oubliant que c’était une fantaisie sur le Roi Lear dans la bruyère.

— Oui, Cordelia paraît !… dit Pestzov frappant sur le programme en papier glacé qu’il tenait, et le tendant à Lévine.

Alors seulement Lévine se rappela le titre de la fantaisie et se hâta de lire, en traduction russe, les vers de Shakspeare insérés sur un côté du programme.

— On ne peut pas suivre autrement, dit Pestzov à Lévine, car son interlocuteur étant parti, il n’avait plus à qui parler.

Pendant l’entr’acte, entre Lévine et Pestzov commença une discussion sur les qualités et les défauts de l’école de Wagner. Lévine tâchait de prouver que le tort de Wagner et de tous ses adeptes était de vouloir faire passer la musique dans le domaine d’un autre art, faute que la poésie commet également quand elle veut décrire les traits du visage, ce que doit faire la peinture. Comme exemple d’une faute pareille, il cita un sculpteur qui avait imaginé de représenter dans le marbre les ombres des images poétiques se dressant autour du poète sur le socle.