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eux. À la station suivante, Katavassov suivit ce conseil. Il passa en deuxième classe et fit connaissance avec des volontaires. Ils étaient assis au coin du wagon et causaient à haute voix, sachant fixée sur eux l’attention des voyageurs et de Katavassov qui venait d’entrer. Le grand jeune homme, à la poitrine enfoncée, causait plus fort que les autres. Il paraissait ivre et racontait une histoire quelconque arrivée dans son institut. En face de lui se trouvait un officier, déjà plus jeune, en uniforme de la garde autrichienne. En souriant il écoutait le narrateur et l’interrompait. Un troisième, en uniforme d’artilleur, était assis près d’eux sur une valise ; un quatrième dormait. Engageant la conversation avec le jeune homme, Katavassov apprit que c’était un riche marchand de Moscou, maintenant ruiné, qui à vingt-deux ans avait déjà dilapidé une grande fortune. Il ne plut point à Katavassov ; il était trop veule et maladif. Évidemment il était convaincu, surtout maintenant, après avoir bu, qu’il accomplissait un acte héroïque et il s’en vantait de la façon la plus désagréable. Un autre, un officier en retraite, fit également sur Katavassov un impression fâcheuse. On voyait que c’était un homme qui avait essayé de tout. Il avait été employé de chemin de fer, gérant, organisateur de fabriques, et il parlait de tout sans aucune nécessité en employant mal à propos des termes scientifiques.