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— Oui, mon oncle, répondit-il, regardant Stépan Arkadiévitch et rougissant de nouveau.

L’oncle appela l’enfant et le prit par la main.

— Eh bien, comment cela va-t-il ? demanda-t-il, désirant lui parler et ne sachant que dire.

L’enfant rougit sans répondre, tâchant de retirer doucement sa main de celle de son oncle. Aussitôt que Stépan Arkadiévitch lui eut lâché la main, Serge, comme un oiseau remis en liberté, après avoir jeté un regard interrogateur sur son père, sortit rapidement de la chambre.

Une année s’était écoulée depuis que Serge avait vu pour la dernière fois sa mère. Depuis, il n’avait jamais entendu parler d’elle. Cette même année, on l’avait mis à l’école ; il s’était lié avec des camarades, il les aimait. Les rêves et les souvenirs de sa mère, qui, après sa rencontre avec elle, l’avaient rendu malade, maintenant ne l’occupaient plus. Quand ils paraissaient, il les chassait rageusement, les considérant comme quelque chose de puéril, bon pour des fillettes mais pas pour un garçon. Il savait qu’une querelle avait séparé son père de sa mère, qu’il devait rester avec son père, et il tâchait de s’habituer à cette idée.

Il lui était désagréable de voir son oncle, qui ressemblait à sa mère ; sa présence provoquant des souvenirs qu’il jugeait honteux. Cela lui était d’autant plus désagréable que, d’après quelques paroles entendues près de la porte du cabinet de travail, et