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et pensait : « Que devient-elle maintenant ? S’est-elle endormie ? Comment va-t-elle ? Que pense-t-elle ? Est-ce que mon fils, Dmitri, pleure ? » Et au milieu de la conversation, au milieu d’une phrase, il sortit précipitamment de la chambre.

— Fais-moi savoir si on peut aller la voir ? dit le vieux prince.

— Bon, tout de suite, répondit Lévine, courant droit chez elle.

Elle ne dormait pas et causait à voix basse avec sa mère du prochain baptême. Habillée, peignée, coiffée d’un élégant bonnet à rubans bleus, les mains appuyées sur la couverture, du regard elle l’attira près d’elle. Son regard, toujours clair, devenait encore plus limpide à mesure qu’il s’approchait d’elle. Son visage avait changé son expression terrestre pour cette expression supra-terrestre qu’on remarque sur les visages des morts, mais au lieu d’un adieu c’était comme un retour à la vie. De nouveau une émotion semblable à celle qu’il avait éprouvée au moment de l’accouchement lui serrait le cœur. Elle lui prit la main et lui demanda s’il avait dormi. Il ne put répondre et se détourna pour cacher sa faiblesse.

— Moi, j’ai dormi un peu, Kostia, lui dit-elle. Je me sens si bien maintenant.

Elle le regarda, mais tout d’un coup son expression changea.

— Donnez-le moi ! dit-elle, entendant les cris