cessa d’être une chose vague, morte, pour s’animer,
prendre vie, au point qu’il n’y avait plus rien à y
ajouter. Tout le personnage était vivant. Il y aurait
évidemment quelques retouches à faire ; on pourrait,
par exemple, et il le faudrait même, déplacer
les jambes, modifier la position du bras gauche,
rejeter les cheveux en arrière ; mais toutes ces
retouches ne changeraient en rien l’expression
générale de la figure, elles ne feraient qu’accentuer
son caractère. Ce serait presque la débarrasser
des voiles qui la cachaient aux regards.
Chaque nouveau trait faisait ressortir davantage
l’énergie de la figure, telle qu’elle lui était apparue
soudain, grâce à la tache de bougie. Il achevait
soigneusement son dessin quand on lui apporta les
cartes.
— Tout de suite, tout de suite ! dit-il. Puis il rentra chez sa femme.
— Voyons, Sacha, ne sois pas fâchée, lui dit-il avec un sourire tendre et même craintif. Tu as eu tort, j’ai eu tort aussi. Tout s’arrangera.
Et, réconcilié avec sa femme, il endossa un paletot olive à col de velours, prit son chapeau et partit à son atelier. Il avait déjà oublié son dessin si bien réussi dans la préoccupation que lui causait la visite de ces grands personnages russes venus en calèche pour voir son atelier.
Quant à son tableau qui s’y trouvait exposé, au fond, son opinion était que personne ne serait