Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol17.djvu/372

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La femme de chambre pimpante qui vint lui offrir ses services était coiffée et habillée avec beaucoup plus de recherche que Dolly, et, comme tout ce qui meublait la chambre, était nouvelle et chère. Daria Alexandrovna était charmée de sa politesse, de sa propreté, de sa complaisance, mais elle était gênée en sa présence. Elle se sentait confuse de sa camisole raccommodée, choisie par erreur ; elle avait honte de ces mêmes pièces dont elle était si fière chez elle. À la maison, elle savait calculer que pour faire six camisoles il faut vingt-quatre archines de calicot à soixante-cinq kopeks l’archine, ce qui fait plus de quinze roubles, sans compter la façon et la doublure ; et le raccommodage économisait ces quinze roubles. Mais devant cette femme de chambre elle se sentait humiliée.

Daria Alexandrovna éprouva un vrai soulagement quand elle vit entrer dans sa chambre la vieille bonne Annouchka : l’élégante camériste était appelée chez madame et Annouchka resta avec Daria Alexandrovna.

La vieille bonne, ravie de l’occasion de revoir Daria Alexandrovna, bavarda tant qu’elle put. Daria Alexandrovna remarqua son désir d’exprimer son sentiment sur la situation de sa maîtresse et surtout sur l’amour et le dévouement du comte pour Anna Alexandrovna ; mais dès qu’elle entama ce sujet Dolly l’arrêta.

— J’ai été élevée avec Anna Arkadievna, je