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— Je suis tout à fait calme, maman.

— Combien l’arrivée d’Anna a été heureuse pour Kitty et malheureuse pour elle, dit Dolly. Oui, c’est tout à fait le contraire, ajouta-t-elle, frappée de son idée. Alors Anna était heureuse et Kitty se trouvait malheureuse. Et maintenant c’est tout l’opposé. Je pense souvent à elle !

— Ce n’est pas la peine. Une femme sans cœur, dit la mère qui ne pouvait oublier que Kitty avait épousé Lévine et non Vronskï.

— Quel besoin aviez-vous de parler de cela ? dit Kitty avec dépit. Je n’y pense jamais et n’y veux pas penser… non, je n’y veux pas penser, répéta-t-elle, entendant le pas bien connu de son mari sur l’escalier de la terrasse.

— À qui ne veux-tu plus penser ? demanda Lévine paraissant sur la terrasse.

Mais personne ne lui répondit et il ne renouvela pas sa question.

— Je regrette de troubler votre intimité, dit-il en jetant sur elle un regard mécontent, et comprenant qu’il venait d’être question de quelque chose qu’on n’aurait pas dit en sa présence.

Pour un instant il partagea les sentiments d’Agafia Mikhaïlovna furieuse d’être obligée de faire la confiture de framboises à la mode Stcherbatzkï. Cependant il sourit et s’approcha de Kitty.

— Eh bien ? lui demanda-t-il, avec cette expres-