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lui-même y gagnait d’être beaucoup plus libre. De son côté Dolly était d’avis que le séjour à la campagne pendant l’été était salutaire aux enfants, surtout à la fillette qui ne pouvait se remettre de la scarlatine ; en outre, elle y voyait le moyen de se débarrasser de toutes sortes de mesquines humiliations, telles que les petites dettes au marchand de bois, à l’épicier, au cordonnier, qui la tourmentaient sans cesse. Enfin, le départ lui était encore agréable parce qu’elle espérait recevoir à la campagne sa sœur Kitty qui devait revenir de l’étranger au milieu de l’été et à qui l’on avait ordonné les bains de rivière. Kitty écrivait des eaux, que rien ne lui souriait tant que de passer l’été avec sa sœur à Ergouchovo, car ce séjour était plein de souvenirs d’enfance pour elles deux.

Les premiers temps de son installation à la campagne furent très pénibles pour Dolly.

Elle avait vécu à la campagne dans son enfance et ce séjour lui avait laissé l’impression d’être un refuge contre tous les ennuis de la ville ; la vie, là-bas, si elle n’était pas aussi élégante, ce dont elle prenait facilement son parti, était en revanche commode et peu coûteuse : il y a de tout, pensait-elle, tout est bon marché, on peut trouver tout ce qu’on veut, et pour les enfants c’est parfait. Mais, une fois à Ergouchovo, comme maîtresse de maison, elle se rendit compte que les choses n’étaient pas telles qu’elle se l’imaginait.