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Arkadiévitch, vous vous conduisez en vrais patriotes. Combien en avez-vous ? demanda-t-il au maître de la maison.

Et souriant gaiement, il lui tendit un petit verre. Tout le monde se mit à rire et Stépan Arkadiévitch tout le premier.

— Oui, oui, c’est le meilleur moyen, dit-il tout en mangeant le fromage et versant une eau-de-vie spéciale dans le petit verre qu’on lui tendait.

Cette boutade mit fin à la discussion sur une impression de gaieté.

— Ce fromage n’est pas mauvais, en voulez-vous ? dit Oblonskï.

Puis s’adressant à Lévine :

— Est-ce que tu fais encore de la gymnastique ? demanda-t-il en lui tâtant de la main gauche le biceps.

Lévine sourit, contracta son bras et sous les doigts de Stépan Arkadiévitch, une saillie ronde et dure comme l’acier se souleva sous l’étoffe fine.

— En voilà un biceps ! Quel Samson !

— Il doit falloir une grande force pour chasser l’ours, dit Alexis Alexandrovitch, qui avait les conceptions les plus vagues sur la chasse.

Et prenant du fromage, il se mit à déchirer les tranches de pain fines comme des toiles d’araignées. Lévine sourit.

— Il n’est pas besoin de beaucoup de force ; un enfant peut tuer un ours.